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Des jeunes ont fait la bringue toute la nuit ; ils hurlent en s'invectivant ; ils n'arrêtent pas ce bastringue ; sourdingues et leurs fringues cradingues au sortir des boîtes de nuit, ils trouvent la vie dingue. Quant à Marie, elle cherche un flingue pour quitter ce monde à toute berzingue.
Sur sa peau nue, comme une robe légère, le reflet du soleil qui traverse les rideaux.
Les nouveaux pères courent en poussant leur poussette... Il s'agit du début d'un scénario poussif.
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Une lectrice est assise à la terrasse d'un café-restaurant, face à la mer, où elle n'a pas ses habitudes. Une bruyante famille déjeune à la table voisine. La lectrice n'observe pas le manège des enfants qui agace les jeunes parents. Elle voyage dans le temps au pays des transhumanistes et de l'intelligence artificielle. Le père de famille se retrouve seul pendant un moment, il regarde la femme assise à la table voisine et qui semble absorbée dans sa lecture : « Je prendrais bien la poudre d'escampette avec elle », imagine-t-il — fugitivement.
Marie se désole d'être si solidement arrimée à l'existence à cause de ses lourds dictionnaires qu'elle garde.
Un libertin n'est-il pas quelqu'un qui vous veut du bien ?
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CHEVILLARD — La contemplation est sans projet.
PESSOA — Ne pas tenter de comprendre ; ne pas analyser... Se voir soi-même comme on voit la nature ; contempler ses émotions comme on contemple un paysage — c'est cela, la sagesse...
CIORAN — La sagesse ? L'art de se déprendre. L'insensé s'emballe, le sage se déprend.
MARIE — Vos pensées sont la matière noire qui sculpte mon cerveau.
Les matineux échappent plus vite à la nuit noire.
Au coeur de la station balnéaire, les familles déambulent au long des chemins qu'on leur trace.
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Je ne pars pas en vacances ; pourquoi m'emmènerais-je en vacances alors que je me supporte déjà toute l'année ?
Marie, au cinéma, a vu un monstre extraterrestre qui parvient à fabriquer un vaisseau spatial qui décolle de la Terre et le ramène sur sa planète d'origine : Marie aussi ne se sent pas de ce monde trop terrestre.
Une vie tout entière consacrée à ne rien faire.
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Hier, à la galerie de peinture que j'ouvre quotidiennement au public, j'ai dû convaincre de nouveaux visiteurs que l'oeuvre artistique garde les ténèbres qu'elle emprisonne pour nous enchanter avec ce qu'elle montre. Et pendant que je rassurais mon auditoire au sujet du mystère que ne dévoilent pas les peintures, les personnages des toiles chuchotaient des secrets à l'oreille des voyageurs qui découvraient une nouvelle terre : l'imaginaire.
Dans l'allée qui borde mon cabinet d'écriture, passe un plongeur en combinaison, armé d'un harpon : mon idée pend à sa flèche.
Marie marche vite sur un trottoir étroit, deux poussettes, venant de chaque côté, roulent sur le même trottoir dans sa direction : Marie descendra-t-elle du trottoir ? Ou résistera-t-elle à l'envahisseur ?
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Sur Terre, à 7h12, le dimanche 07 août 2011 :
6 982 278 192 Population mondiale actuelle
79 171 518 Naissances cette année
108 930 Naissances du jour
33 813 465 Décès cette année
46 523 Décès du jour
45 358 054 Croissance démographique cette année (*)
Dans les Cahiers de Cioran au même instant : « La croyance à l'irréalité du monde ne détruit pas la peur. » J'ai peur... fatalement.
Toutes ces vies qui ne me disent rien et qui pourtant en disent long sur la nature humaine.
Une course d'orientation a lieu au Cap d'Agde. Les coureurs paraissent désorientés.
(*) Données statistiques Worldometers.
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« À voir un jeune chien courir
Les oiseaux parapher le ciel
Le vent friser le lavoir bleu
Les enfants jouer dans le jour
À sentir fraîchir la soirée
Entendre le chant d'une porte
Respirer les lilas dans l'ombre
Flâner dans les rues printanières
Rien moins que rien pourtant la vie »
Le post-humain ne sera plus capable de ressentir ces milles nuances d'être humaines que dévoile Aragon : le post-humain connaîtra l'éternité mais il sera privé de la poésie de l'instant qui ne sera pas augmenté par la technologie, qu'il trouvera fade — moindre.
Le généticien sait comment nous sommes là ; mais, ne lui demandons pas pourquoi, il n'en sait rien.
Marie est fort marrie de ne pas avoir de souci aujourd'hui.
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Marie voyait fleurir autour d'elle des figures constituées de modules noirs disposés dans un carré à fond blanc. Elle comprend maintenant que ces ornements discrets mais multiples qui envahissent son champ visuel sont des codes-barres en deux dimensions qui servent de guides à l'utilisateur d'appareil mobile. Marie n'est pas convaincue de la capacité de son cerveau à traiter toutes ces informations dont on veut la gaver.
Marie sait que les poètes décodent plus précisément le monde que les lecteurs de code QR.
« Profane » est une entrée dans le dictionnaire de la résistance de Marie.
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Marie surveille l'état de la mer et son horizon infini comme on chérit la solitude — inspirante.
Le temps d'apprendre à vivre et j'en ai déjà marre.
Combien de caresses encore pour t'apprivoiser ?
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Je lis une phrase lumineuse du généticien et prix Nobel belge Christian de Duve : « La nature ne traite pas mieux le poète que le scorpion. » Je me sens alors tout à fait bien au coeur de cette nature indifférente à l'humain.
Et bientôt, l'homme lui-même ne reconnaîtra plus ses semblables parmi les chimères (hybrides homme-animal) qu'il crée en laboratoire.
« Cybride » (terme issu de la contraction de « cytoplasme » et d'« hybride ») est une entrée dans le dictionnaire transhumaniste de Marie.