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402
« Garçon, je vous prie de baisser le son de votre poste de radio qui m'empêche d'entendre la tempête de mer se déchaîner. »
L'homme moderne semble tout faire en musique, à longueur de temps sur les ondes, il cherche la meilleure fréquence pour survivre.
La musique involontaire est l'alarme qui fait fuir les poètes.
401
Un dauphin mâle, bleu et blanc, le ventre à l'air sur la plage que je fréquente. La bête s'est échouée dans la tempête. Étrange voisin mort que ce dauphin gisant sur le sable.
L'orgueil humain pousse les nantis à croire qu'ils peuvent sauver la planète qui, franchement, en a vu d'autres, des catastrophes. La Terre s'en remettra quand nous cesserons d'apparaître.
Marie aura si peu agi au cours de son existence qu'elle craint de ne pas être fatiguée au moment de l'ultime sommeil.
400
Sept milliards d'individus et autant de solitudes.
Écrire une note sur la table du salon quand toutes les baies sont grandes ouvertes, le vent marin qui bouscule l'air domestique et mes petites idées toutes rabougries.
Marie s'autofictionne pour ne pas oublier qu'elle vit.
399
En ce jour de commémoration des fidèles défunts, je sens les regards des morts, qui furent mes proches, peser sur ma nuque chaude. Me trouvent-ils bien ingrate à me réchauffer, comme je fais, au soleil de novembre ?
Semblable au colibri qui tente d'éteindre un feu de forêt avec les gouttes d'eau qu'il prélève dans la mer, je fais ma part en limitant mon empreinte écologique par le refus de la maternité.
Un repas composé de patates douces et de miel, arrosé de thé vert... Soudain, la vie paraît délicieuse.
398
Marie demande à l'assistant intelligent d'iPhonette de rechercher une nouvelle idée. L'assistant vocal lui répond : « Je ne comprends pas ce que vous voulez. Désolé de vous laisser tomber. »
Proverbe matinal : C'est en bousillant tout qu'on devient un être humain.
On a eu besoin de la chair à canon pour mener les guerres. On a besoin de la chair à centre commercial pour consommer.
397
06:49 sur Terre. Aujourd'hui, au moment où je rédige cette note, l'œil rivé sur le compteur de la population mondiale, je constate avec effarement que dans douze heures nous serons sept milliards d'individus à occuper cette planète — encore bleue.
L'idée de savoir que nous serons sept milliards avant ce soir engendre un désespoir serein au fond de moi car je n'y suis pour rien.
Marie a entendu dire que l'homme et la femme rêvaient d'éternité.
396
Parfois, tout autour de moi, cela sent la maison que j'occupais lorsque j'étais une petite fille et qu'on me promettait de grandir au sein d'un monde enchanté.
La plupart du temps, tout autour de moi, cela ressemble à un monde déplaisant qui m'attriste.
Si je donnais la vie à un enfant, je devrais lui mentir à mon tour puis surprendre son regard désenchanté.
395
À propos de l'expression « sentir le sapin », nous utiliserons une nouvelle expression en ces temps écologiques : « sentir le carton ». En effet, on peut se faire enterrer aujourd'hui dans une boîte en carton décorée.
Partout dans la maison childfree des piles de livres et de revues. Mais que cherche Marie ?
Surveille-t-elle le monde pour ne pas être surprise par lui ?
394
Evidemment, iPhonette, objet de haute technologie, surprend son utilisatrice en se transformant, grâce à une application révolutionnaire, en boîte à meuh qui crie « Banzaï ».
Ce jeune couple ne se relâche plus depuis que leur nourrisson agrippe son monde qu'il découvre sans se lasser.
Comme si en transmettant leurs gènes, les nouveaux parents transmettaient aussi l'effort de vivre à leur progéniture : « À toi maintenant de prouver que tu existes durant un siècle ! »
393
Tel un adhésif, Marie colle à la réalité qui la dérange. Elle adhère à la peine et à la difficulté d'être soi. Marie tient fermement à l'enfer qui est le sien.
Je ne peux plus me perdre dans mes idées maintenant, j'ai une boussole.
Toutes ces minuscules craintes pas fondées du tout qui dévorent votre esprit intranquille.