Fuite
« Fuyons comme le tourbillon dévastateur du cyclone l’égocentrique extraverti ! »
« L'égocentrique est conservateur de son cher moi irritable, toujours dressé en défensive contre un monde dont chaque approche est une menace pour un idéal fixé et jaloux »
« [Les] drogues qui entraînent le développement de l'attitude extravertie et confiante »
Fuyez le dragon griffu qui cherche votre compagnie. Laissez-le s'envoler vers d'autres horizons que le vôtre qu'il cherchera à obscurcir avec son feu qui carbonise. Libérez-vous de son emprise en l'envoyant cracher ailleurs son feu destructeur. Restez au frais.
Robots
« L'affreux instrument d'abêtissement égalitaire, d'universel nivellement de l'esprit que sont les Propagandes, multiplie les idées simplistes aux dépens des idées simples, les deux termes n'étant pas plus synonymes que ceux d'infantile et d'enfantin. Hélas ! tout le diabolisme du monde moderne est infantile et simpliste à faire crever de rire les Mauvais Anges. La Civilisation Mécanique finira par promener autour de la Terre, dans un fauteuil roulant, une Humanité gâteuse et baveuse, retombée en enfance et torchée par les Robots. »
Philippe Muray cite dans son livre Essais, Après l'Histoire I, p 132, éditions Les Belles Lettres cette observation frappante que Bernanos fit à la fin des années 40 sur le désir grandissant du genre humain de retomber en enfance. Cette vision prophétique et apocalyptique de Bernanos m'interpelle et m'autorise à approfondir ma connaissance à propos de mes congénères. Je vois bien à présent qu'un rien ne les amuse, qu'ils tournent le dos à la gravité existentielle en la moquant et en la rendant ridicule. Je vois bien leurs manœuvres imbéciles pour échapper au sourire aguicheur de la camarde. Je vois bien leur désespérance idiote. Je retourne jouer avec mes Playmobils.
Réponse
« Facebook fête ses dix ans d'existence. En quelle année vous êtes-vous inscrit ? Pourquoi ? Qu'en attendiez-vous à l'époque ? Comment votre usage a-t-il changé ? Qu'est-ce que votre présence sur ce réseau a changé dans votre vie ? Pensez-vous fermer votre compte bientôt, un jour peut-être ? L'avez-vous déjà fermé ? Une sélection de témoignages sera publiée sur Le Monde.fr. »
Je m'inscrivis sur Facebook le 16 juillet 2009, j'avais 39 ans. Je pris la décision d'ouvrir un compte afin de partager plus aisément ma curiosité quant au milieu littéraire, pictural, photographique et artistique en général. Etant une fervente admiratrice de l'œuvre d'Eric Chevillard notamment, je pensais me rapprocher de lecteurs aussi passionnés que moi. Patiemment, je pus entretenir des relations virtuelles et intellectuelles avec des personnes inconnues qui comblaient mon appétit de connaissance. J'ouvris un blog que j'alimentais quotidiennement et que je partageais sur le réseau social. Je rejoignis certains sites afin de devenir chroniqueuse. Je devins ainsi une actrice et une observatrice de la littérature pointue. Avertie grâce au réseau social, tout était à ma portée de clavier azerty (hommage à Le Désordre azerty d'Eric Chevillard). Je découvris de nouvelles écritures qui me bouleversèrent. Je fus informée de l'actualité des écrivains qui me passionnaient. J'assistai à un colloque international, à un atelier d'écriture, à des rencontres-lectures avec des écrivains... Facebook fut mon université populaire.
Aujourd'hui, en 2014, je passe de plus en plus de temps sur le réseau social qui me maintient en contact permanent avec tout ce qui attise ma curiosité. Mon cerveau fonctionne a plein régime grâce à cet outil qui, comme Internet, est d'utilité publique. Par contre, l'usager facebookien doit rester très prudent quant au choix de ses amies et amis virtuels.
Incréé
Cet enfant incréé qui occupe parfois tes pensées et qui n'occupera jamais ton ventre, tu lui parles malgré son inexistence ; tu lui rends hommage quant à son absence. Tu affectionnes ce petit pour sa discrétion, son mutisme, son silence. Tu le remercies surtout de ne pas t'accompagner au cours de ton parcours douloureux et existentiel. Tu lui exprimes ta gratitude de demeurer ailleurs, là où rien ne survient jamais. Là où rien ne bouge que les particules isolées, non rassemblées, indéterminées. Tu murmures à son oreille immatérielle : « Reste inattendu ».
Procrastination
Tu procrastines en tentant d'éviter l'inexorable instant où tu devras agir pour faire avancer tes projets qui t'encombrent tellement que leur masse informe appuie sur ta cervelle. Tu maugrées en t'inventant mille raisons d'échapper au moment redouté qui te précipitera dans le travail et la concentration intense. Toi, tout ce que tu veux se résume à la pratique de la lecture et un peu à celle de l'écriture. Tu marches aussi dans la nature ou les cimetières sans effort. Tout le reste ne te cause que du souci. Pourtant, rien ne surgit des brumes de la paresse d'autre que ton ennui qui augmente inéluctablement.
Habitude
Tu éprouves ce matin un sentiment étrange : tu voudrais t'échapper de ta cage domestique, partir à la découverte de nouveaux horizons plus vastes et moins connus. Echapper aux choses familières que tu finis par trouver vulgaires. Tu emmènerais avec toi ton homme qui te conduirait où tu le désirerais, aux confins de contrées étrangères. Tu penses à lui qui travaille à quelques mètres de toi ; tu irais le chercher ; tu frapperais à sa porte ; tu entrerais ; tu t'avancerais vers lui ; tu le prendrais par la main... Et vous partiriez loin tous les deux dans le lointain... Mais quelque chose te retient ici à ta table d'écriture et de lecture... l'habitude.
Bien-être
« Tu ne me chercherais pas, si tu ne m'avais trouvé. »
Une telle phrase vient percuter et illuminer tes neurones comme la boule d'un billard électrique fait clignoter le plateau et le fronton du « flipper » et tu ressens un profond bien-être à avoir trouver ce trésor que tu étais apte à trouver.
Techno-sécurité
« Cher abonné, vous êtes enregistré comme participant à un trouble massif à l'ordre public. »
Quand tu reçois un tel message sur ton téléphone portable, tu peux ranger ton livre « 1984 » de George Orwell dans ta bibliothèque car la fiction rejoint la réalité à présent à Kiev en Ukraine. Tu comprends que tu t'es imposée à toi-même ton propre « télécran ». Tu regardes ton téléphone portable en pleurant.
Cierge
« Il avait laissé brûler devant lui ce petit cierge à sa dévotion [la jeune fille], sans plus s'en soucier que d'une ampoule qu'il aurait oublié d'éteindre avant de s'endormir. »
Au bord du don de soi, jamais je ne m'y trouve, toujours en retrait, loin des personnes, de leurs préoccupations, toujours exaspérée et intolérante. L'humain en moi m'indispose autant que l'humain en eux m'insupporte. L'évocation de ce qu'ils sont m'ancre dans ce que je ne veux surtout pas être. Et que je suis pourtant malgré moi. Cette rage en moi quand je prends conscience que j'oublie sans cesse de m'élever au delà de ma propre condition humaine. Cette soif inextinguible me tourmente : lire, écrire ; écrire, lire. Je reste là sans mot dire, à maudire.
Idiotie
« Les voisins, c'est toujours des drôles de gens. »
Les nombreux gentils voisins pensent que vous leur devez le « Bonjour ! » à l'occasion de chaque rencontre inévitable durant le jour ou la nuit hors de votre domicile ou du leur seulement quand les fenêtres sont fermées, que ce soit dans la cour de l'immeuble, dans la rue, sur le chemin de la plage, sur la plage, jusque dans la mer, chez les commerçants, sur la route à vélo ou en voiture, au restaurant, au café, au cinéma, au spectacle, au musée... De toutes parts, en tous lieux, les voisins ont des droits et surtout celui de vous adresser la parole à tout bout de champ sous n'importe quel prétexte : la copropriété, le temps, la haute saison, la basse saison, les actualités, la maladie, ses symptômes, ses remèdes, l'hôpital... Si vous avez des voisins, vous devenez leur proie favorite parce que votre tête leur dit vaguement quelque chose, parce qu'ils vous reconnaissent, parce qu'ils connaissent votre adresse qui est la leur et parce qu'ils connaissent vos habitudes quotidiennes : votre ombre est dans leur collimateur.